La Synagogue de la Ghriba
La synagogue de la Ghriba est une synagogue tunisienne qui constitue l’un des principaux marqueurs identitaires des Juifs de Djerba, l’une des dernières communautés juives vivantes du monde arabe.
Le village où elle se situe, portant aussi le nom de Hara Sghira («petit quartier»), abrite une communauté juive de plusieurs centaines de personnes. Cet établissement est également connu sous le nom de Dighet, nom provenant d’une variante berbère du mot hébreu signifiant « porte ».
L’établissement fait l’objet d’un pèlerinage annuel, à l’occasion de la fête juive de Lag Ba’omer, rassemblant plusieurs milliers de pèlerins. C’est aussi l’une des principales attractions touristiques de l’île de Djerba.
La renommée de la synagogue est basée sur les nombreuses traditions et croyances qui soulignent son ancienneté et le fait qu’elle contiendrait des restes du Temple de Salomon. Historiquement, le pèlerinage rassemblait les membres des communautés locales et plus largement les Juifs de Tunisie et de la Libye voisine. Avec le départ des Juifs des pays arabes, les visiteurs viennent surtout de France.
Comme les six autres ghriba dispersées à travers le Maghreb, elle se dresse isolée en rase campagne, à un kilomètre du village d’Erriadh, nommé Hara Sghira (petit quartie, l’une des deux bourgades juives que compte l’ile et qui n’était habité jusqu’au XXe siècle que par des Cohanim, ce qui, selon les légendes locales, corrobore le fait que la Ghriba ait été fondée par des prêtres venus de Jérusalem. On y trouve cinq synagogues mais, afin de maintenir la prééminence de la Ghriba, la tradition veut que les rouleaux de la Torah qui y sont utilisés soient gardés à la Ghriba où ils sont amenés en procession.
Historiquement, Il est difficile de déterminer à quelle époque la renommée de la Ghriba a dépassé le cadre originel de Djerba. A partir de la seconde moitié du XIXe siècle, on voit apparaitre des témoignages soulignant son caractère sacré, reconnu au-delà de la communauté juive par les musulmans. La synagogue attire des pèlerins venus de Tunisie et de la Libye voisine, toujours plus nombreux. Il est possible que l’émigration à cette époque des Juifs djerbiens dans ces régions ait contribué à la diffusion du pèlerinage.
On sait d’après le témoignage de Slouschz qui visite les lieux au début du XXe siècle que l’édifice a été agrandi dans les années 1860 ou 1870 à l’aide de « pierre tumulaires que l’on a trouvé dans le cimetière avoisinant les murs de la maison sainte ». Il décrit lui-même l’édifice comme un « bâtiment carré, assez sobre d’aspect et manquant totalement de style. A l’intérieur, des couloirs obscurs précèdent une nef carrée ayant un « Almenor » au milieu, et en haut une galerie appuyée sur des colonnes : rien de particulier, de caractéristique ».
Cependant, avec les rénovations et les modifications postérieures du bâtiment, le nombre de fenêtres a augmenté. Les modifications postérieures sont particulièrement évidentes du côté nord du bâtiment où elles ont provoqué des changements par rapport au plan symétrique original du bâtiment. La cour intérieure est entourée par des loggias couvertes et bâties sur des voûtes et des colonnes. Les bâtiments adjacents servent de logement aux pèlerins, les plus anciens ayant été érigés à la fin du XIXe siècle et ayant été suivis d’une deuxième structure établie au début des années 1950. A savoir, comme d’autres synagogues de Djerba, la Ghriba est située à proximité d’un cimetière juif antique.
Le Pèlerinage
Un pèlerinage annuel, qui a lieu à la Ghriba au 33e jour du Omer, rassemble les Juifs d’Afrique du Nord. Les festivités commencent le 14 Iyar pour la commémoration de Rabbi Meïr Baal HaNess et continuent jusqu’au 18 Iyar (fête du Lag Ba’omer), jour du souvenir de Rabbi Shimon bar Yohaï localement connu sous le nom de Rabbi Shem’un. Le pèlerinage inclut une visite à la synagogue, l’aumône, des prières et la participation à l’un des deux cortèges qui ont lieu pendant les deux derniers jours du pèlerinage.
Les Juifs de Djerba, comme les pèlerins étrangers, se mélangent à l’intérieur de la synagogue. C’est également la seule occasion où il n’y a aucune séparation entre hommes et femmes. Dans les années 1990 et 2000, la plupart des pèlerins viennent de l’étranger. D’après une autre coutume locale, les femmes déposent des œufs marqués du nom d’une jeune fille célibataire sur une voûte marquant l’endroit où, selon la tradition, le corps de la jeune fille aurait été trouvé. L’œuf, laissé près d’une bougie pour la durée du festival, est ensuite retourné à la célibataire qui, après l’avoir mangé, serait sûr de trouver un mari.